Les Groupements Fonciers Agricoles (ou GFA) sont des sociétés civiles spécifiques à l’agriculture créées dans les années 1970 pour faciliter les transmissions d’exploitations. La forme juridique a beaucoup évolué et peut également être vue comme un moyen intéressant en termes d’investissement ! Dans cet article on essaiera donc de découvrir un peu mieux le fonctionnement, les intérêts et les inconvénients des GFA !
Cet article sur le GFA et l’investissement dans la terre agricole est le premier de la série sur les Groupements Fonciers. Retrouvez nos deux autres articles sur :
- Investir dans des forêts grâce au Groupement Foncier Forestier
- Investir dans des vignes grâce au Groupement Foncier Viticole
Comment fonctionne un Groupement Foncier Agricole ?
Qu’est-ce qu’un Groupement Foncier Agricole ?
Un Groupement Foncier Agricole (ou GFA), est une société civile qui a pour objet la détention de foncier agricole. Il permet d’acheter du foncier agricole à plusieurs personnes, exploitantes ou non des terres. Ces personnes sont appelées les associées. Il faut un minimum de deux associés pour le constituer. Aucun montant minimum n’est obligatoire.
Pour rappel, une société civile est une société qui n'est pas commerciale. Donc si vous voulez mettre en commun un ou des biens pour en partager les bénéfices générés par une activité non commerciale vous pouvez créer une société civile.
Qui peut investir dans un GFA ?
Seules des personnes physiques peuvent investir dans un GFA ! C’est une des spécificités des GFA et il existe une poignée d’exceptions pour certaines personnes morales qui peuvent être autorisées aussi à y investir :
- Les SAFER mais pour une durée limitée (cf code rural)
- Les coopératives agricoles
- Les assurances
- Les sociétés d’intérêt collectif agricole.
Maintenant que vous avez une idée de l’utilité d’un GFA vous souhaitez peut-être en constituer ou en rejoindre un.
Comment constituer un GFA ?
Pour constituer un GFA il vous faut :
- Des terres et/ou bâtiments à usage agricole
- Le capital social peut être constitué par des apports en numéraires (en argent) ou en propriété d’immeubles à destination agricole (stabulation, maison d’habitation, champs, etc.). Ce capital sera découpé en parts sociales qui pourront être attribuées sous forme de certificats nominatifs.
- Les associés ne peuvent être que des personnes physiques (avec une exception pour la SAFER) finançant le Groupement Foncier Agricole et détenant les parts sociales.
- Des statuts qui sont les règles qui régissent le groupement foncier. Ces statuts régissent notamment la manière dont sont prises les décisions, la gestion ainsi que les conditions de retrait des associé·es et de rachat des parts. Ces associé·es sont tenu·es indéfiniment des dettes du GFA, à proportion de leurs apports.
- Éventuellement un pacte d’associé·es définissant certaines conditions supplémentaires que l’on ne pourrait pas inscrire dans les statuts (options d’achat ou de vente, droits de sortie conjointe ou obligations de sortie par exemple).
- Immatriculer le GFA au registre du commerce et des sociétés (RCS).
Quels sont les objectifs de la création d’un GFA ?
Les GFA sont très souvent créés afin de préparer une transmission de foncier agricole avec plusieurs objectifs possibles :
- Conserver l’unité du foncier : en présence de plusieurs enfants, cela permet d’éviter de diviser ce foncier et de conserver une unité qui fait sens sans avantager aucun de ses successeurs ;
- Faciliter une transmission : une installation demande beaucoup de moyens et d’investissements dans du matériel, des équipements et l’achat du foncier alourdit encore ces besoins. Créer un GFA, porté par des associés familiaux la plupart du temps (mais pas obligatoirement), permet de consacrer ses investissements dans l’exploitation. Cela permet aussi une acquisition ultérieure et progressive de ce foncier via l’acquisition des parts sociales dudit GFA !
- Éviter l’indivision : en cas de divorce ou de décès, une indivision peut se créer. Ces indivisions peuvent être précaires et mettre en danger le foncier puisque les décisions doivent souvent être prises à l’unanimité des indivisaires (sauf en cas de convention). Cette situation est plutôt bien traitée par les GFA via les statuts et l’éventuel pacte d’associé ou règlement intérieur associé.
- Aider à l’installation de jeunes agriculteurs : des GFA ont aussi été créés pour aider des jeunes agriculteurs qui ne peuvent acheter leur terres, à s’installer. De la même façon, ces GFA peuvent aussi servir à pérenniser une exploitation (en cas de vente des terres louées auparavant). De multiples exemples sur le territoire dont les GFA mutuels de la Marne par exemple ont été créés dans ce but. C’est d’ailleurs dans le même but que Feve a lancé sa foncière solidaire.
Une fiscalité attractive, un des intérêts majeurs des GFA
Au-delà des objectifs qu’il permet de remplir, des avantages fiscaux sont attachés aux GFA, des avantages en termes de transmission et de succession principalement.
Ainsi les parts sociales des GFA sont exonérées de droits de succession à hauteur de 75% jusqu’à 500 000€ et 50% ensuite.
A noter que des modifications ont été apportées par la loi de finances 2023 sur la durée de conservation et exonération :
Jusqu’alors, la durée de conservation minimale était de 5 ans et la limite pour l’exonération de 75% était de 300 000 €.
Désormais, sous conditions de conserver les biens transmis pendant 10 ans, la limite est portée à 500 000 €.
Les deux seuils et conditions coexistent :
- seuil limite de 300 000 € et engagement à conserver 5 ans
- seuil limite de 500 000 € et engagement à conserver 10 ans.
En plus de ces avantages successoraux, le fait de louer à long terme les terres détenues par le GFA permet d’exonérer partiellement les parts sociales d’IFI (à hauteur de 75% jusqu’à 100 000€ et à 50% ensuite).
Pourquoi et comment investir dans un GFA ?
Quels sont les intérêts d’un tel investissement ?
Le GFA peut être un placement intéressant en termes de diversification de portefeuille puisqu’il donne accès à un actif tangible (la terre agricole) dont la valeur a progressé historiquement de manière très progressive et peu volatile.
La rentabilité liée aux fermages (les loyers payés sur les terres agricoles) est relativement limitée (entre 1% et 2.5% par an en général) mais est améliorée par le potentiel de revalorisation des terres ainsi que par la fiscalité.
La fiscalité attractive (cf plus haut) avec des exonérations sur l’Impôt sur la Fortune Immobilière ou sur les droits de succession rend ce type d’investissement encore plus intéressant.
Enfin, certains GFA sont aussi créés avec un objectif social (par exemple permettre l’installation de jeunes agriculteurs) et/ou environnemental (par exemple faciliter la transition agroécologique) qui peuvent ajouter un intérêt non financier à ce type d’investissement !
Comment trouver des parts de GFA à acheter ?
Il existe assez peu de possibilités d’investir dans un GFA puisqu’il n’est pas autorisé de faire de l’offre au public de titres financiers (cf contraintes et inconvénients plus bas). Quelques banques ou sociétés de gestion gèrent quelques GFA mais ils sont très rares. Il existe aussi les GFA de la Marne dont j’ai parlé plus haut. Mais la plupart des opérations se font via des connaissances et ne sont donc pas facilement disponibles.
D’où l’intérêt de créer des structures un peu différentes mais plus facilement accessible au public (avec offre au public de titres financiers) comme peut le faire FEVE.
Comment déclarer les revenus provenant d’un Groupement Foncier Agricole ?
Si vous possédez des parts d’un GFA vous allez certainement percevoir des revenus. Ils sont à déclarer dans votre revenu global en tant que revenus fonciers dans le cas d’une GFA-bailleur et en tant que bénéfices agricoles dans le cas d’un GFA exploitant.
Comment acheter ou vendre des parts de GFA ?
Les parts sont créées et peuvent donc être acquises au moment de la constitution du GFA (ou de l’augmentation de capital de celui-ci) mais il est également possible de les acquérir sur un marché secondaire en passant par des banques ou des sociétés gérant ce type de bien (comme FEVE). La vente (ou le don) de parts de GFA est généralement définie dans les statuts de ce dernier et est parfois circonscrite aux autres membres du GFA.
Hormis la constitution initiale du GFA, en cas de cessions de parts la fiscalité suivante s’applique :
- 125 € dans le cas d’un GFA de plus de 3 ans
- Un droit d’enregistrement de 5% pour les GFA de moins de 3 ans (articles 726, I. 2 et 730 bis du CGI).
Comment est géré un GFA ?
Le gérant est désigné par les associés et s’occupe des affaires courantes du GFA (tenue de la comptabilité, organisation de l’estimation ou de la revente des parts, etc.). Cette personne (morale ou physique) peut être associée du GFA ou non.
Dans le cas d’associés exploitants, ceux-ci sont en général considérés comme gérants statutaires.
Toutes les décisions qui sortent de la gestion courante sont décidées en assemblée générale constituée de tous les associés et du gérant. Les règles de majorité pour ces prises de décision doivent être prévues dans les statuts du groupement.
Chaque année, un rapport de gestion ainsi que le détail des investissements et le montant du revenu à déclarer, peut être adressé aux associés du GFA.
Quelles sont les principales contraintes des GFA ?
Le manque de liquidité du GFA
Comme nous l’avons vu, les associés détiennent des parts de groupement foncier agricole et leur acquisition est souvent encadrée par les statuts et éventuellement un pacte d’associés. Ces caractéristiques en font un placement tangible mais peuvent rendre complexe la revente des parts. Avant d’investir dans un GFA il est important d’étudier les conditions de cession de ses parts car cela peut prendre plusieurs mois voire être impossible si les autres associés et aucun tiers ne sont en mesure de racheter vos parts.
Une solution à ce manque de liquidité est qu’un tiers soit missionné pour organiser la revente des parts. C’est ce que propose FEVE en organisant le marché secondaire dans sa foncière agricole et dans les autres véhicules utilisés pour investir dans du foncier agricole.
La responsabilité des associés
Comme pour les SCI, les associés d’un GFA sont responsables des dettes de la société sans aucune limite et proportionnellement à leur participation dans le capital social.
Une surface maximale
La surface des GFA non familiaux ne peut dépasser la superficie de 30 fois la Surface Minimale d’Assujettissement (SMA). La SMA est définie par arrêté préfectoral dans chaque département. Comme le point suivant, cette limite est une des raisons pour lesquelles il n’existe pas ou peu de GFA de taille conséquente.
Un GFA ne peut pas faire d’appel public à l’épargne (ou d’offre au public de titres financiers)
Un GFA n’a pas le droit de faire de l’offre au public de titres financiers ce qui empêche d’utiliser ce type de structure juridique pour porter du foncier avec une grande quantité de personnes. C’est ce qu’avait voulu changer le dernier gouvernement avec le projet de GFAI dans le cadre de la PLOA en 2024 mais cette disposition n’a finalement pas été votée.
Qu’en conclure ?
Le GFA est une formidable opportunité pour les agriculteurs et agricultrices qui ne pourraient acquérir le foncier dont ils et elles ont besoin. C’est en ce sens que l’Etat prévoit une fiscalité avantageuse tout en encadrant le prix des fermages pour éviter que la charge soit trop importante pour ces agriculteurs et agricultrices. C’est aussi un formidable outil pour faciliter transmission et installation de la nouvelle génération d’agriculteurs. Cela peut aussi devenir un outil d’investissement intéressant (diversification de patrimoine, fiscalité attractive) mais relativement difficile d’accès et rare du fait de l’impossibilité pour des GFA de faire de l’offre au public de titres financiers. Et attention au risque de liquidité en cas d’investissement !