Marguerite Legros

-

Mis à jour le

31/10/2024

Installation agricole

Législation et Statut

Tout comprendre aux statuts agricoles

Quel statut juridique pour son projet agricole ? Cette question qui peut sembler accessoire quand vous commencez à monter votre projet agricole est en fait centrale !

Marguerite Legros

-

Mis à jour le

31/10/2024

Installation agricole

Législation et Statut

Sommaire

Les statuts agricoles ne sont pas la première chose à laquelle on réfléchit lorsque l'on planifie de s'installer. Pourtant l'impact des choix juridiques que vous faites pour votre future ferme est grand, tant sur le plan de la rémunération que de l'organisation du travail. Nous vous proposons dans cet article de désacraliser le sujet du statut juridique et de ses implications. Cela se fera en plusieurs parties :

  • Statuts agricoles individuels : les possibilités en cas d’installation seul·e avec l’entreprise individuelle et l’EIRL ;
  • Les options sociétaires en cas d’installation à plusieurs avec des focus sur le GAEC, l’EARL, la SCEA, la SAS et le SCOP ;
  • Nous prendrons le temps de décortiquer les implications de ces statuts agricoles juridiques et de vous expliquer comment cela se traduit pour votre activité agricole.

Le régime fiscal fera l’objet d’un autre article, mais il est bien sûr étroitement lié au sujet de l’habillage juridique !

Sommaire

Quel statut agricole pour sa future ferme ? Cette question qui peut sembler simple, ou accessoire quand vous commencez à monter votre projet agricole est en fait assez centrale dans la structuration de votre projet. De votre statut agricole dépendra beaucoup d’éléments essentiels au bon fonctionnement de votre exploitation. Il est donc important de choisir son statut en ayant bien analysé toutes les dimensions de son projet agricole.

D’ailleurs on évoque souvent la structuration juridique (nous pourrions aussi utiliser le terme d’habillage juridique car votre choix ne doit pas structurer votre projet mais l’habiller au mieux en étant adapté à ses particularités) car cela dépasse un simple statut agricole. Souvent la structure juridique est liée au statut fiscal et social. Ce n’est pas un détail neutre à choisir en toute fin de construction de projet car de là vont dépendre les aides que vous pouvez recevoir, les limites de votre responsabilité, des conditions de rémunération et même les activités que vous êtes autorisé·e à effectuer !

Dans cet article sont évoqués :

Les possibilités en cas d’installation seul·e avec l’entreprise individuelle et l’EIRL ;
Les options sociétaires en cas d’installation à plusieurs avec des focus sur le GAEC, l’EARL, la SCEA, la SAS et le SCOP ;
→ Nous prendrons le temps de décortiquer les implications de ces statuts agricoles et de vous expliquer comment cela se traduit pour votre activité agricole.

Le régime fiscal fera l’objet d’un autre article, mais il est bien sûr étroitement lié au sujet de l’habillage juridique !

1. Quel statut agricole pour ma ferme ?

L’agriculture est dotée de règles particulières : 

  • socialement : elle dépend du régime de la mutualité sociale agricole (MSA),
  • fiscalement : elle relève du régime des bénéfices agricoles,
  • juridiquement : some text
    • l’activité est de nature civile (ni commerciale, ni industrielle, ni artisanale). 
    • formes sociétaires particulières (EARL, GAEC…). 
    • régie par un code particulier : le Code rural.

Pour pouvoir définir votre statut agricole vous devez savoir si vous souhaitez vous installer seul·e ou à plusieurs (en société).

Si le choix est de s’installer en société, avant de choisir ses statuts agricoles il est très important de répondre collectivement à des questions essentielles. Si ces dernières sont ignorées, elles peuvent à long terme mettre en péril la pérennité de l’exploitation agricole.

Ce sont notamment :

  • L’analyse des facteurs humains, de laquelle doit impérativement ressortir la volonté de travailler ensemble, de partager les responsabilités ;
  • L’étude économique du projet qui doit donner la quasi-assurance que l’exploitation pourra faire vivre convenablement les associés ;
  • Pour les exploitants individuels soumis au régime du bénéfice réel, l’étude du coût de la cessation d’activité comme exploitant individuel (réévaluation du bilan, taxation des plus-values) ;
  • La mesure des conséquences patrimoniales d’une constitution de société entre les membres d’une même famille.

2. Les statuts agricoles pour une installation individuelle

L'entreprise individuelle

Ce statut agricole de base est le plus simple pour une installation seule. Il offre :

  • Une simplicité juridique et administrative
  • Pas de capital minimum requis
  • Une imposition sur le revenu qui dépend de l’activité générée
  • Une possibilité d’avoir des salarié·es

Point d’attention cependant, ce statut entraîne une responsabilité illimitée sur les biens personnels, vous êtes personnellement responsable des dettes de votre exploitation en cas de faillite.

L'Entreprise Individuelle à Responsabilité Limitée (EIRL)

En alternative à l’entreprise individuelle, l'EIRL présente les caractéristiques suivantes :

  • Protection du patrimoine personnel
  • Déclaration d'affectation du patrimoine professionnel obligatoire
  • Régime fiscal : soumise à l’impôt sur le revenu mais possibilité d'opter pour l'impôt sur les sociétés
  • Régime social : possibilité d’accorder un statut social aux membres de la famille participant aux travaux sur la ferme (aide familial, collaborateur·rice d’exploitation, etc.)

À noter : si vous exercez une activité secondaire, il est possible de prétendre au régime de l’auto-entreprise. Toutefois, cette activité annexe ne peut pas être de nature agricole. Par exemple, vous pouvez créer une EIRL agricole au sein de laquelle vous exercez le maraîchage et pratiquer en parallèle la photographie en auto-entrepreneuse (il n’aurait pas été possible d’être éleveuse en auto-entrepreneuse).

Paysage avec bovins

3. Les statuts agricoles pour une installation en société

Le Groupement Agricole d'Exploitation en Commun (GAEC)

Le statut agricole du GAEC se distingue par :

  • Le principe de transparence (avantages pour les aides PAC),
  • 2 à 10 associés, tous exploitants donc travaillant sur la ferme de façon exclusive et à temps complet,
  • Un agrément spécifique requis (avec un passage en commission et des contrôles)
  • Une responsabilité limitée à 2 fois les apports
  • La possibilité d’être en micro-BA (seuil multiplié par le nombre d’associé·es)
  • Capital social minimum de 1500€

À noter : lorsqu’en GAEC il est normalement impossible d’avoir une activité autre qu’agricole même à titre d’auto-entreprise. Cependant il est possible de demander une dérogation si le nombre d’heures effectuées à l’extérieur ne dépasse pas un certain seuil. La dérogation est au bon vouloir de chaque département.

L'Exploitation Agricole à Responsabilité Limitée (EARL)

L'EARL est un statut agricole qui présente les caractéristiques suivantes :

  • 1 à 10 associés,
  • Au moins un associé exploitant,
  • Capital social minimum de 7500€,
  • Responsabilité limitée aux apports

La Société Civile d'Exploitation Agricole (SCEA)

La SCEA offre une grande flexibilité :

  • Minimum 2 associés, sans maximum,
  • Pas d'obligation d'associés exploitants (aucun·e des associé·es ne travaille sur la ferme),
  • Pas de capital social minimum,
  • Responsabilité illimitée des associés en pourcentage de leurs apports.

La Société par Actions Simplifiée (SAS)

La SAS, bien que moins courante en agriculture, permet :

  • Une grande liberté statutaire,
  • Pas de minimum d’associé·es,
  • Responsabilité limitée des associées au montant de leurs apports,
  • L'intégration de personnes morales dans la gouvernance,
  • Des activités de transformation et commercialisation non limitées aux produits de la ferme, possible d’avoir une activité commerciale prépondérante,
  • Une imposition obligatoire à l'impôt sur les sociétés.

Retrouvez toutes ces informations dans les tableaux récapitulatifs ci-dessous.

Tableau récapitulatif
Tableau récapitulatif
Tableau récapitulatif
Tableau récapitulatif

En bref, sur la structuration juridique de votre ferme

Pour sélectionner le statut agricole le plus adapté, considérez :

  • Le nombre d'associé·es souhaité,
  • Les activités envisagées,
  • La séparation des patrimoines personnel et professionnel,
  • Le niveau de responsabilité désiré,
  • Le régime fiscal préféré,
  • Les possibilités d'évolution de la ferme.

N’oubliez pas que votre statut agricole influencera :

  • Les aides auxquelles vous pouvez prétendre
  • Votre régime fiscal et social
  • Les activités autorisées (transformation, commercialisation)
  • La gouvernance de votre ferme (la prise de décision, les entrées et sorties potentielles d’associé·es, etc.)

Le choix du statut agricole est une décision complexe qui mérite une réflexion approfondie. N'hésitez pas à consulter des expert·es pour vous guider dans cette étape cruciale de votre projet agricole ! Il est préférable de dépenser un pourcentage de votre budget d’installation pour vous faire conseiller avec justesse plutôt que de regretter pendant 5 ans un mauvais statut et passer du temps une fois installé·e pour en changer !

FOCUS – Qu’entend-on par activité agricole ?

Côté juridique

Le droit définit les activités agricoles selon plusieurs critères : par leur nature (de production), par rattachement ou dans le prolongement de la production (transformation, vente directe) ou par le support (ferme auberge), ainsi que par détermination de la loi (activités équestres, méthanisation…). Les exploitants sont aussi autorisés à réaliser, sous conditions, certaines activités commerciales (déneigement, photovoltaïque).

Article L311-1 – Code rural

«Sont réputées agricoles toutes les activités correspondant à la maîtrise et à l’exploitation d’un cycle biologique de caractère végétal ou animal […] ainsi que les activités exercées par un exploitant agricole qui sont dans le prolongement de l’acte de production ou qui ont pour support l’exploitation[…], les activités agricoles ainsi définies ont un caractère civil.»

Exemples d’activités agricoles : culture, élevage, transformation, conditionnement des produits agricoles, vente des produits de l’exploitation, activités touristiques (chambres d’hôtes, fermes auberges, gîtes ruraux, accueil touristique, tables d’hôtes…) à la condition qu’elles soient exercées avec des produits d’exploitation. Les activités de production de biogaz, d’électricité et de méthanisation sous condition que ces productions soient issues pour au moins 50 % de matières provenant d’exploitations agricoles.

Côté fiscal

La fiscalité définit quant à elle, comme agricoles**, les activités de production, qui s’inscrivent dans leur prolongement, ainsi que certaines activités équestres, la biomasse, la production d’énergie à partir de produits majoritairement issus de l’exploitation agricole ….

** En sens de l’article 63 du CGI et ses commentaires

En revanche, la fiscalité prévoit des seuils de tolérance. Ainsi, les produits, relevant des BIC et BNC, provenant d’activités accessoires d’un exploitant agricole au réel, « peuvent être pris en compte pour la détermination du bénéfice agricole lorsque, au titre des trois années civiles précédant la date d’ouverture de l’exercice, la moyenne annuelle des recettes accessoires commerciales et non commerciales de ces trois années n’excède ni 50 % de la moyenne annuelle des recettes tirées de l’activité agricole au titre desdites années, ni 100 000 € »***

***CGI art. 75 modifié par la Loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018

Ainsi le droit fiscal permet de rattacher les revenus des activités accessoires commerciales aux activités agricoles pour les exploitants au bénéfice réel à condition de respecter ces seuils.

Ces dispositions ne sont que des tolérances fiscales. Et une tolérance fiscale ne sera jamais une «loi» juridique, ces deux domaines étant indépendants l’un de l’autre. En principe, les sociétés agricoles ne peuvent avoir qu’un objet agricole et elles ne tolèrent pas les activités commerciales, même accessoires.

Conséquence ici : il est possible d’utiliser cette tolérance fiscale dans certaines structures juridiques, beaucoup plus risqué dans d’autres. En particulier, il n’est absolument pas conseillé d’utiliser cette tolérance en GAEC où il y a un risque – si l’activité agricole (au sens juridique) n’est pas respectée – de passer en responsabilité illimitée avec perte d’avantages significatifs comme celui de la transparence. C’est moins le cas en SCEA par exemple.

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