Le terme d’investissement éthique n’est sans doute plus étranger aux oreilles de qui prête un peu d’attention à l’actualité financière. Mais comme chaque tendance, il est toujours utile de creuser la sémantique pour mieux comprendre les réalités qui se cachent derrière ces termes génériques.
Une étude diligentée par l’AMF en 2023 révèle que 2/3 des Français accordent de l’importance aux enjeux de développement durable, y compris dans leurs choix d’épargne : 54 % disent les prendre en compte dans ce contexte et 75 % considèrent l’impact des placements sur l’environnement comme un sujet important. Pour autant, seule la moitié des sondés étaient en mesure de définir un investissement durable.
Cet article vous apportera donc un éclairage sur les points suivants :
- Quels sont les différents types d’investissement éthique et comment les identifier ?
- Comment fonctionnent les fonds d’investissement éthique ?
- Quelles structures permettent de faire des placements responsables ?
- Comment un particulier peut investir de manière éthique, même des petits montants ?
- Que rapporte l’épargne responsable ? Quels en sont les risques ?
1. Investissement éthique, durable, vert, solidaire, responsable: quelles différences ?
L’utilisation de ces différents termes recouvre une même réalité : la volonté croissante des épargnant.es d’allier investissement et impact positif d’un point de vue environnemental, social et/ou sociétal. Cet impact peut englober une variété de secteurs : énergies renouvelables, habitats solidaires ou encore aides aux personnes vulnérables.
Et plus particulièrement, qu’entend-on par un investissement éthique ?
On parle d’éthique pour l’alignement entre les valeurs (morales, religieuses, sociales…) des investisseurs et investisseuses et les produits financiers souscrits et donc in fine les entreprises et les projets soutenus par ces produits d’épargne ou d’investissement. Suivant les sensibilités de chacun, les projets financés pourront varier, expliquant ainsi la multiplicité des termes, la multiplicité des propositions ainsi que la multiplicité des labels.
2. Comment investir de façon éthique ? Quels sont les différents types d’investissement ?
Les fonds ISR (investissement socialement responsable) :
L’investissement socialement responsable intègre des critères de performance sociale et/ou environnementale à la recherche de rentabilité financière d’un placement. Ce sont les fameux critères ESG, pour Environnement, Social et Gouvernance. Chacun de ces trois grands piliers est constitué d’une multitude de critères d’analyse qualifiés d’extra-financiers, parmi lesquels on retrouve à titre d’exemple des éléments comme l’empreinte carbone, la parité hommes-femmes, ou le niveau de rémunération des dirigeants. Peu importe le produit d’investissement considéré (via tous les types de fonds, en actions ou obligations, en parts sociales, en royalties, en actifs immobiliers, etc.), cette dimension qui excède le seul potentiel de gain financier est le premier jalon d’identification d’un placement éthique
On l’aura compris, la finance responsable est donc d’abord associée au secteur de la gestion d’actifs et rassemble des fonds de nature très différents. Ces structures s’appuient soit sur leur propre méthodologie d’évaluation ESG, soit sur les travaux des agences de notation extra-financière, pour évaluer les qualités et faiblesses d’un projet ou d’une entreprise.
Il est à noter cependant que ces fonds ISR sont régulièrement accusés de “green ou social washing”. Deux raisons à cela :
- Les agences de notation extra-financières ne sont pour l’heure soumises à aucune régulation. Ce manque de contrôle et d’harmonisation sur les critères d’évaluation a ainsi pu conduire le groupe Orpea, désormais empêtré dans le scandale autour de la maltraitance des personnes âgées, à se situer parmi les mieux notés de son secteur.
- Un indice éthique peut intégrer des entreprises qui ne correspondent pas aux valeurs que souhaite soutenir un individu à travers ses placements. Les entreprises sélectionnées sont celles qui présentent les meilleurs scores, obtenus après la pondération des trois volets de l’ESG. Quelqu’un qui met au centre de ses priorités la lutte contre le réchauffement climatique ne tient pas forcément à soutenir une entreprise liée aux déplacements aériens à travers ses choix d’épargne.
Pour contrer ces limites, différents labels et réglementations ont été développés :
- Label ISR : label ESG généraliste détenu par l’Etat qui ne concerne que les fonds
- Label Finansol : label privé spécialisé sur différents types de produits solidaires (fonds, parts sociales etc)
- Label Greenfin : label public sur la thématique de la transition écologique (exclusion du fossile et du nucléaire)
- Règlement européen SFDR : obligation pour les gestionnaire de fonds de déclarer l’article d’appartenance de leurs fonds (trois articles - 6, 8 et 9 - allant du moins-disant au mieux-disant en terme d’ESG)
Pour approfondir les questions de stratégies d’investissement des fonds ISR, d’acteurs de l’ISR, et des labels de la finance éthique, rendez-vous sur notre précédent article concernant les labels dans les investissements responsables.
Cependant, ces mêmes labels ne sont pas exempts de limites. Reprenons le cas des articles SFRD. La classification est administrée par les sociétés de gestion elles-mêmes, sans contrôle externe. Que conclure alors de l’impressionnante marge de progression constatée en un an, entre mars 2021 et mars 2022, de la part des fonds classés en articles 8 et 9, passée de 30,9 % du marché européen à 45,6% ? Elle est surtout le fait de la croissance des fonds en article 8, à la définition finalement très large et indulgente.
Ce qui nous permet d’embrayer sur les faiblesses de la labellisation, puisque 60% des fonds labellisés ISR en France relèvent des fonds monétaires. Or,ces fonds investissent dans des instruments de trésorerie court terme - donc difficilement conciliables avec des politiques RSE ambitieuses. A cela s’ajoute une absence d’harmonisation dans l’évaluation des critères ESG,un certain manque d’exigence sur la transparence réclamée aux sociétés de gestion entraînant un certain revers de crédibilité. Un label durable qui semble peu fiable, et c’est toute l’épargne durable qui est susceptible de subir un revers…
De manière plus générale, est-ce que multiplier les labels à accoler à une offre de fonds déjà pléthorique est une aide à la décision pertinente pour qui souhaite investir ? Deux tendances s’opposent :
- Stratégie de standardisation : permettre à un nombre croissant de fonds d’être labellisé grâce à des seuils ESG facilement atteignables et donc peu exigeants
- Stratégie de niche : avoir des labels plus exigeants mais accessibles uniquement aux fonds éthiques les plus ambitieux
Outre cette zone de flou dans la définition même des ISR, d’autres barrières à l’investissement durable semblent être à considérer du côté des particuliers. Le rapport des Français et des Françaises aux placements en général est parfois un peu ambigu. Selon un sondage Ifop de 2021, 57% des répondants pointent du doigt le montant des frais lié à leur compte épargne, et ils sont tout de même 40% à estimer ne pas être satisfaits de la qualité des conseils reçus pour la gestion de leurs placements. Si on ajoute ces éléments au manque de lisibilité de l’investissement responsable, voire à un manque de confiance dans les marchés financiers, les fonds verts et éthiques n’apparaissent pas forcément comme une solution miracle.
Ces éléments critiques sur la gestion des placements verts remettent au cœur des préoccupations deux éléments : d’une part, pour les acteurs financiers, la nécessité d’assurer un maximum de transparence autour des processus de sélection de leurs placements qualifiés de responsables.
D’autre part, ressort le besoin d’une implication et d’une responsabilisation plus marquées des individus vis-à-vis de leur épargne, à qui revient la prérogative de choisir des solutions de placements en accord avec leur échelle de valeur éthique.
Quels sont les autres canaux de financement éthique ?
L’esprit commun qui les anime ? Celui de pratiquer un « investissement en circuit court », en toute transparence vis-à-vis de leur clientèle tant du point de vue des frais que de l’usage des placements, et avec la volonté de contribuer à une économie tangible et non-spéculative. C’est pourquoi la plupart de ces sociétés offrent des solutions de placement sous forme d’investissements directs (en don contre don, en prêts rémunérés, en actions, en obligations, en titres participatifs, en royalties ou en parts sociales) dans des projets ou des sociétés jugés éthiques, non cotés.
Par rapport aux placements dans des fonds, ces différents supports se démarquent à plusieurs niveaux :
- Ils misent sur le fait de fédérer une communauté de particuliers engagés.
- Ils revendiquent la traçabilité et la transparence rigoureuses du modèle d’affaires de l’intermédiaire financier, du projet ou des entreprises financées et de leurs retombées.
- Ils entendent démocratiser l’épargne et faciliter les choix de placements responsables.
- Ils reposent sur la simplicité du canal digital avec des processus d’investissement très fluides.
Ils engagent davantage la responsabilité du particulier (par rapport aux supports d’investissement à capital garanti), avec une incertitude sur l’atteinte des objectifs de financement et les performances des projets soutenus. Là encore, de nombreux acteurs se retrouvent au sein de cette catégorie.
- Les banques vertes traditionnelles
->Banques proposant des produits d’épargne solidaire et/ou écologique (CAT, livret). Ces dernières excluent également certains secteurs controversés de leurs investissements comme les activités d’extraction / transformation du pétrole. Par exemple : le Crédit Coopératif ou la Nef
- Les néo banques vertes
->Bien qu’elles proposent également des produits d’épargne éthique, ces dernières sont avant tout des banques en ligne donc bien plus digitalisées et réactives. Par exemple : GreenGot ou Helios.
- Les coopératives
->Via l’achat de parts sociales, les épargnants contribuent directement au développement de la structure choisie. Cela lui permet donc de choisir plus spécifiquement certains secteurs. Par exemple : Enercoop, Citiz, railcoop…
- Le financement participatif
->Grâce à des plateformes en ligne, des entrepreneurs en recherche de financement publient leurs projets avec un objectif de collecte. Les épargnants intéressés peuvent ainsi y contribuer via des dons (avec souvent une contrepartie). A noter que l’on n’y retrouve pas uniquement des projets à forte dimension éthique. Par exemple : Lita.co ou Miimosa.
- Les foncières solidaires
-> Outil historique de l’économie sociale et solidaire, les foncières gèrent des projets immobiliers ou agricoles. Elles sont dites solidaires si elles ont un pour objectif un impact solidaire et/ou écologique inscrit dans leurs statuts. Par exemple : Habitat & Humanisme ou FEVE.
Pour en savoir plus, nous vous renvoyons à notre précédent article qui détaille les particularités des ces différents acteurs ainsi qu’un guide sur l’investissement dans des foncières solidaires.
FEVE appartient d’ailleurs à la catégorie des foncières solidaires ! À l’aide de l’épargne de citoyens et citoyennes engagé·es, la foncière de FEVE acquiert puis met à la location des exploitations agricoles pour faciliter l’installation de jeunes agriculteurs. Notre foncière s’engage sur la qualité de l’exploitation des terres acquises, sur la base d’un cahier des charges agroécologique ambitieux.
Pour plus de détails sur le fonctionnement de FEVE, nous vous conseillons de lire notre guide sur l’investissement dans le foncier agricole ainsi que notre article sur les foncières solidaires.
3. Risques et rentabilité : l’investissement éthique est-il rentable ?
Quelle rentabilité pour des investissements éthiques ?
Les rendements bruts annuels sont assez variables selon le type de projets, le domaine, la structuration de la dette de l’entreprise soutenue….En effet, comme dans tout type d’investissement, la rentabilité dépend avant tout du risque pris. Bien que l’investissement éthique soit souvent présenté comme moins rentable qu’un investissement classique, ce n’est pas toujours le cas. Si l’on compare les indices MSCI World (indice boursier) et MSCI World SRI (indice boursier qui concentre les entreprises avec les meilleures notations ESG / exclue celles avec des externalités négatives trop fortes), on remarque que ce dernier a de meilleures performances financières sur du long terme alors même que les rapports rendements/risques de ces deux indices sont équivalents. De plus en plus d’acteurs financiers sont d’ailleurs convaincus que des investissements qui font la part belle aux indicateurs extra-financiers seront certainement plus résilients et donc plus performants dans le futur.
En outre, les placements qui vont soutenir les projets d’entreprises engagées bénéficient parfois de différentes politiques fiscales avantageuses :
- Dispositif Madelin IR-PME, destiné à soutenir le financement des petites entreprises. Sous conditions, il permet une réduction d’impôt à hauteur de 25% du montant investi, jusqu’à 50 000 euros pour un contribuable seul et 100 000 euros pour un couple. En cas de surplus de réduction d’impôt, un report est possible sur 5 ans maximum. Dans la même mesure, si l’investissement dans des PME est supérieur au plafond, les sommes investies peuvent être reportées sur la prochaine déclaration d’impôt. Ce dispositif est non cumulable avec les avantages fiscaux des PEA et PEA-PME. L’avantage fiscal est également plafonné comme toutes les niches fiscales à hauteur de 10 000 euros.
- Pour les PEA et PEA-PME : 5 ans après l’ouverture effective du plan, les dividendes et plus-values sont exonérés d’impôt. Les produits restent soumis aux prélèvements sociaux s’élevant à 17,2%.
- Certaines entreprises recherchant des financements sont également éligibles au mécanisme d’apport-cession, qui permet un report d’imposition de la plus-value en plaçant les titres au sein d’une holding dédiée, avant de les céder.
- Les placements dans les entreprises et foncières agréées ESUS permettent également en général une réduction d’impôt de 25% de l’investissement jusqu’au plafond annuel de 10 000 euros.
FEVE étant une foncière agréée ESUS, ses investisseurs peuvent bénéficier de cette réduction d’impôts de 25%. Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter la page suivante Détentions d’actions et fiscalité.
Les investissements éthiques sont-ils plus risqués ?
Les risques des placements durables dans les structures mentionnées plus haut sont ceux que l’on retrouve classiquement pour les produits d’entreprises non cotées en développement, susceptibles de connaître des revers de fortune dans leur activité. On garde en tête :
- Le risque de perte en capital, partielle ou totale.
- Le risque de non-paiement ou de paiement différé des intérêts.
- Le risque de liquidité : comme les entreprises concernées ne sont pas cotées, leurs titres ne sont échangeables que de gré à gré. Certaines plateformes mettent en place un marché interne de vente ou d’échange de titres.
- Le risque de rang de priorité du remboursement : les obligataires pour les dettes dites « junior » devront attendre le remboursement des créanciers détenant la dette « senior » prioritaire.
Il faut se rappeler que les plateformes de financement, les coopératives et les foncières réclament un engagement dans la durée de la part de l’investisseur, en général compris entre 2 et 7 ans (et parfois en lien avec l’avantage fiscal perçu).
On peut donc difficilement affirmer qu’un investissement éthique est moins risqué qu’un investissement standard. Cependant, il est à noter que les placements éthiques permettent d’avoir une dépendance réduite aux risques environnementaux. Selon vos choix d’investissement, les structures qui mettent l’environnement au cœur de leurs enjeux sont celles qui à priori anticipent le mieux ces risques et qui donc auront une meilleure résilience face aux crises à venir.
En plus de notre engagement dans la transition écologique, l’investissement au sein de FEVE apporte une sécurité importante car investi dans un actif tangible, le foncier agricole. Vous trouverez plus d’informations sur ce point dans cet article spécifique au placement dans le foncier agricole.
En conclusion
Il ne faut pas être trop naïf : ce n’est pas parce qu’un produit financier est estampillé « vert » ou « éthique » qu’il l’est. Comme le prouve l’étrange conférence de Stuart Kirk, responsable de l’investissement responsable chez HSBC Asset, « Pourquoi les investisseurs ne doivent pas se soucier du risque climatique », à la suite de laquelle il a été suspendu, la spéculation financière reste pour l’essentiel guidée par une gestion des risques et un appétit de gains sur le court terme. Seule une poignée d’acteurs peut réellement être qualifiée d'engagée.
Et c’est notamment le cas de FEVE, en plaçant votre épargne dans notre foncière, vous contribuez à la transition écologique en France tout en facilitant l’installation de la nouvelle générations d’agriculteurs et agricultrices.